lundi 24 septembre 2018

Le cinéma coréen meilleur que le cinéma américain




Le monde change, le cinéma aussi.
Depuis le cinéma muet et Charlie Chaplin, le cinéma américain n'a cessé de nous émerveiller. Il a longtemps été à la pointe de toutes les innovations et nous avions régulièrement des chefs-d’œuvre, ou des films à grand spectacle palpitants.
Mais depuis une décennie, il faut reconnaître que le cinéma américain semble arrivé en bout de course : les commerciaux ont visiblement pris le pas sur les créatifs en leur imposant des scénarios blockbusters tellement téléphonés que le spectateur ne ressent plus rien face à ce déferlement d'effets spéciaux et de rebondissements artificiels et pathétiques. Au niveau du cinéma plus profond, le constat est le même : les Américains s'enfoncent dans le bobo-intello, à tel point que certains films américains ressemblent à de mauvais films français d'art et essai (Drive, le Survivant, la Route).


Dans les années 80-90, le cinéma américain bénéficiait encore d'un esprit anar, présent dans presque tous les films (Mask, Paris Texas, Chute Libre), y compris d'action (Demolition Man), mais ensuite, on dirait que les scénaristes se sont embourgeoisés et ont désormais pris le parti de l'ordre des riches contre les pauvres. Par exemple, les films policiers mettaient auparavant en scène des flics à l'esprit libertaire qui désobéissaient et agissaient selon leur propre conscience (la relève, inspecteur Harry, l”arme fatale…) tandis qu'aujourd'hui, les policiers américains sont du style FBI, avec matériel informatique de pointe, costard et adhésion totale au système. Comme si la société américaine était devenue parfaite !

Les films d'horreur n'échappent pas à la règle : les Américains avaient longtemps été les meilleurs dans le genre, depuis la nuit des morts-vivants, en passant par l'exorciste, les Chucky, Freddy, ou Hellraiser. Aujourd'hui, les films d'horreur retombent dans leurs travers du style Vendredi 13, à savoir une bande de jeunes perdus au milieu de nulle part attaqués par un tueur fou, et une mise en scène qui repose sur une musique angoissante et de mauvaises tentatives pour faire sursauter le spectateur. Pire, depuis Blair Witch, les réalisateurs “caméscope à la main” se sont multipliés pour produire des films ennuyeux à mourir où on ne voit rien et où il ne se passe rien. Finalement, les Français ont fait mieux dans le genre ces dernières années avec “Frontière”, “Goal of the Dead” et “Ils”.

Les films à grand spectacle sont en déclin : les blockbusters tels que les premiers Star Wars, E.T., les dents de la mer, Piège de cristal, Retour vers le futur, Total Recall, Jurrasic Park, Matrix, V pour Vendetta, ont été de bons films, très agréables à regarder, et ce malgré un coffrage scénaristique identique. Les blockbusters des dix dernières années (Inception, les derniers Star Wars, Hunger Games, Harry Potter, Prometheus…) déçoivent. La raison n'est pas dans la structure scénaristique en elle-même, puisque les bons films d'hier reposaient sur elle, non il faut chercher ailleurs les causes du déclin. D'abord, il y a abus d'effets spéciaux. Depuis le passage aux effets numériques, les Américains semblent avoir voulu nous montrer qu'ils étaient des maîtres en ce domaine et au lieu d'utiliser le numérique pour faire mieux, ils ont fait de cet effet une marque de fabrique. De ce fait, il faut absolument les voir dans les films, ce qui engendre au final une impression artificielle, car les Américains ont oublié une chose : les meilleurs effets spéciaux sont ceux que le spectateur ne voit pas.


J'en veux pour exemple, l'excellent film coréen Tunnel où le spectateur reste scotché sur son siège grâce au réalisme des effets spéciaux. Les anciens Star Wars utilisaient des décors, des costumes, des maquettes et tout un tas d'effets concrets, alors on pouvait voir de la poussière sur un véhicule, et tout un tas de petits détails qui avaient leur charme, tandis qu'avec le numérique, on se dit : tiens, encore une scène faite sur ordinateur. Il paraît que les acteurs ne comprennent plus rien aux scènes qu'ils jouent puisqu'une partie d'eux seulement sera ensuite réimplantée dans une scène numérique. Le résultat est qu'ils ne peuvent pas se surpasser en tant qu'acteurs, ils sont devenus un élément parmi d'autres dans une scène, en attendant leur remplacement futur.
Le déluge de numérique provoque la nausée dans Inception, film à mon sens surévalué par les critiques tant il a de défauts : le film veut aller trop vite, on n'a pas le temps de ressentir une ambiance, l'action, décomposée en trois réalités parallèles en même temps, avec dans chacune un soit-disant suspense haletant finit par lasser. Certes, il y a des choses ingénieuses dans ce film, et certaines scènes sont bien, mais dans l'ensemble, j'ai trouvé ce film brouillon, et son réalisateur a voulu trop en faire. Il aurait gagné à être plus lent pour que les personnages gagnent en profondeur, on aurait eu un meilleur film si le scénario avait été découpé dans une trilogie. Dans le même style de film, j'ai trouvé bien meilleur le coréen Lucid Dreams, un film mieux équilibré, avec des effets spéciaux qui s'intègrent parfaitement à l'action, laquelle est mieux dosée, les personnages émeuvent plus. Les acteurs et actrices coréens semblent se donner à fond, alors que les Américains ont du mal aujourd'hui avec les contraintes qu'on leur impose.

Le cinéma pour adolescents produisait, côté américain, des films qui marquaient une génération : les Karaté Kids, les Retour vers le futur, les Goonies, étaient palpitants. Aujourd'hui les Hunger Games, Divergente, ou le Labyrinthe, sont sans âme, et leurs effets scénaristiques ont été déjà faits mille fois, on s'y ennuie à mourir. Là encore, les Russes font mieux avec des films comme The Bride ou Attraction, et les Allemands avec le Club des Crocodiles sont bien plus intéressants que ce que font les Américains ces dernières années pour les jeunes. On a l'impression que les scénaristes et réalisateurs américains ont perdu ce qui faisait autrefois leur force : faire rêver.

Dans le genre historique ou films de guerre, on se souvient de la grande époque américaine avec les classiques produits dans les années 50-80 : la nuit des généraux, le pont de la rivière Kwaï, Patton, Apocalypse Now, Platoon, Full Metal Jacket. Mais récemment je préfère le film coréen Age of Shadows qui nous plonge sous l'occupation japonaise dans les années 20, un film superbe et passionnant. De même, les Chinois font mieux avec les Ip Man ou le Maître d'armes, et les Canadiens ont réalisé un excellent film avec J'ai serré la main du diable, sur le génocide du Rwanda.

Bien sûr il y a des exceptions et on trouve encore quelques chefs-d’œuvre dans le cinéma américain, comme par exemple Interstellar, Gran Torino et les Noces Rebelles, mais il n'y en a plus autant qu'avant. Les années 2010 ont été bien pauvres, et des films de toutes origines les ont surpassés comme le très bon film allemand L'exceptionnel monsieur tout le monde, les films belges Hasta la vista et Ben X, les films iraniens Djinn, ou la lapidation de Soraya, le film brésilien La cité de Dieu, le film britannique Slumdog Millionnaire, le film taïwanais L'odyssée de Pi, et le film franco-québécois La nouvelle vie de Paul Sneijder.

Mais les films des dernières années qui valent vraiment le coup sont Coréens : Mother est un chef-d’œuvre qui vous prend aux tripes et qui soulève des tas de questions sur la façon dont la police ou la société se sert des handicapés mentaux pour résoudre certaines affaires. On ne s'ennuie jamais dans un film subtil et superbement joué par les acteurs.

Dans le genre horreur, J'ai rencontré le diable, est un film délicieusement gore et terrifiant, quant à Dernier train pour Busan, il innove dans les films de zombies, alors même que les Américains multiplient les histoires de zombies sans grand intérêt scénaristique.

En science-fiction, Okja est un film très novateur et très touchant.

Dans le genre des films catastrophes, Tunnel, Pandémie, et The Tower sont tout à fait spectaculaires, avec des effets spéciaux réalistes, des personnages attachants et de bons dialogues.

Et enfin, en blockbuster, il ne faut pas oublier le très bon Perce-Neige qui rappelle certains bons films américains d'action d'il y a 15 ou 20 ans.

En conclusion, aujourd'hui, pour prendre son pied au cinéma, mieux vaut aller voir un film coréen qu'un film américain.

jeudi 13 septembre 2018

Hommage à Anne Sylvestre

Je n'écris pas de chansons, j'en serais bien incapable, toutefois j'aime beaucoup la chanson française, non pas que je sois nationaliste, mais j'aime ma langue natale et j'adore écouter de beaux textes.
Il existe plusieurs niveaux de chansons, d'abord la "chansonnette", celle que Brassens disait être faite pour Gavroche et Mimi Pinson, pour des enfants, pour tout le monde en somme. Je n'ai pas de honte à les écouter, car ça fait aussi du bien d'écouter Balavoine, Polnareff, Isabelle Boulay ou Jonnhy Hallyday.
Ensuite, il y a un niveau au-dessus de ce genre, des chansons un peu plus élaborées du point de vue du texte. Là encore les artistes ne manquent pas : Mc Solar, Thiefaine, Ferrat, Mylène Farmer, Tri Yann, Marie-Paule Belle, Reggiani, et bien d'autres encore. Les chansons sont jolies, avec un peu de vocabulaire et quelques images poétiques, de quoi contenter ma soif, mais pas l'étancher.
Et puis il existe un niveau supérieur, avec des artistes inégalés qui ont multiplié les chefs-d’œuvre. Leurs chansons sont magnifiques, poétiques, parfaitement construites, et font vibrer notre âme avec des messages puissants et des tableaux saisissants de leur époque. Ces chanteurs là se comptent sur les doigts de la main. Le premier que j'ai découvert était Jacques Brel, il a accompagné toute mon adolescence. Puis j'ai connu Georges Brassens, dont la richesse du vocabulaire et la qualité poétique sont juste extraordinaires. Et enfin, j'ai rencontré, grâce à ma compagne, la beauté des chansons d'Anne Sylvestre.
Je la connaissais de nom, et, sans doute à cause des médias, je pensais que c'était une chanteuse des années 60, qui s'était reconvertie dans la chansonnette pour enfants et avait arrêté sa carrière ensuite. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir qu'Anne Sylvestre a commencé en 1957 et ne s'est jamais arrêtée depuis ! J'ai écouté toutes ses nombreuses chansons, une œuvre de 24 albums sans parler des enregistrements en public et des compilations. Ce qui m'a frappé, c'est la richesse qualitative : son niveau n'a jamais baissé en 50 ans, ses dernières chansons sont toutes aussi belles que ses premières. Elle avait d'ailleurs été repérée par Georges Brassens qui avait dit d'elle qu'elle était la meilleure compositrice de sa génération. Anne Sylvestre a écrit des chansons de très haut niveau poétique, avec une gouaille comparable à celle de Brel, et un humour digne de Brassens, la touche féminine en plus.
Reste à comprendre pourquoi cette artiste encore en activité à 84 ans est tombée dans l'oubli médiatique depuis les années 80. Il est tout de même scandaleux que nos journalistes, nos télévisions et nos radios boudent une chanteuse de ce niveau. Jacques Brel et Georges Brassens ont droit à passer sur les ondes, on peut encore les entendre au moins une fois par semaine, ils bénéficient aussi de soirées d'hommage à la télévision. Est-ce le privilège des morts ou parce que ce sont des hommes ? Un peu des deux peut-être.
Quoi qu'il en soit, il est terrifiant de constater que nos médias soient passés à côté d'une œuvre extraordinaire, tout cela soit-disant pour leur indice d'écoute. Quel culot que ce fameux indice d'écoute, quant on sait que les ventes dépendent avant tout d'un matraquage publicitaire : la moindre chanson pour débiles mentaux peut s'entendre partout, dans les magasins, les cafés, à la télé, à la radio, à tel point qu'on finit par en fredonner les airs machinalement. Comme le dit l'excellent chanteur suisse Michel Bülher, "ça passe d'une oreille à l'autre sans frôler le cerveau". Alors Anne Sylvestre serait certainement connue du grand public si on prenait la peine de faire découvrir ses chansons. Va-t-on attendre son décès pour s'apercevoir qu'elle fait partie de notre patrimoine culturel ? Que penser du niveau général d'abêtissement des Français ? Il y a de quoi chercher un mur pour pleurer...
En tous cas, même si je ne suis qu'un modeste blogueur, à Anne Sylvestre je dis "merci !" pour toutes ces magnifiques chansons qui m'accompagnent et dont la richesse des textes fait partie de ma culture littéraire. Merci !

Si vous voulez la découvrir, voici quelques exemples, mais je vous recommande d'acheter ses albums, n'importe lequel, vous ne serez jamais déçus par cette Gulliverte de la chanson française :




Écrire pour ne pas mourir

Une sorcière comme les autres

Je cherche un mur pour pleurer

Douce maison

Lettre ouverte à Elise




Et enfin, Anne Sylvestre a un message pour vous...

Tant de choses à vous dire


Sortie de Face à la Mort sur BoD

Mon nouveau roman, Face à la Mort, est enfin prêt... déjà disponible sur BoD et bientôt sur toutes les plates-formes et les librairies de F...